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Finances de l’Unédic : un désendettement confirmé, des défis avérés

La trajectoire de désendettement de l’Assurance chômage se confirme, malgré un ralentissement de l’économie. Les prélèvements décidés par l’État, en revanche, diminuent les capacités du régime à rembourser sa dette et complexifient la lecture des comptes.

11 juillet 2024

Dans une conjoncture économique moins favorable, confronté à des décisions qui freinent son désendettement, le régime d’assurance chômage fait de nouveau la preuve en 2023 de sa solidité.

En 2022, déjà, l’Unédic avait renoué avec un solde financier positif (3,4 milliards d’euros, issus du compte de résultat de l’exercice 2022), permettant d’enclencher un mouvement de désendettement, qui a été poursuivi en 2023, en dépit des effets de l’inflation couplés à la hausse des taux d’intérêt, qui ont eu un impact sur l’activité et les créations d’emploi.

Cependant, en fin d’année 2023, des prélèvements sur les recettes de l’Assurance chômage ont été instaurés. Il s’agit, plus précisément, de la non-compensation partielle des exonérations de cotisations d’assurance chômage entre 2023 et 2026 pour financer France Compétences et France Travail (en plus de la contribution de l’Unédic déjà existante pour cet opérateur, à hauteur de 11 % des recettes de l’Assurance chômage). Au total : 12,05 milliards d’euros seront prélevés sur l’ensemble de la période, dont 2 milliards d’euros en 2023. Ainsi, fin 2023, l’Assurance chômage a présenté une situation excédentaire de 1,5 milliard d’euros (compte de résultat de l’exercice 2023). Hors prélèvements de l’État, l’excédent aurait été de 3,5 milliards d’euros.

Pour rappel, les dépenses relatives aux allocations (ARE et autres allocations) se sont élevées à 34,1 milliards d’euros en 2023. La contribution au financement de France Travail représentait 4,3 milliards d’euros cette année-là (hors prélèvements de l’État).

L’endettement brut du régime, qui s’élevait à près de 41 milliards d’euros fin 2019 avant la crise, s’est établi à près de 63,2 milliards d’euros fin 2023, en baisse par rapport à fin 2022 (64,6 milliards d’euros).

  • Les outils de financement de l'Unédic

    L'Unédic réalise son financement en utilisant trois programmes d'émission de dette en euros et à taux fixe
    • Le programme NEU CP (Negotiable EUropean Commercial Paper) : titre de créance négociable (TCN) de court terme (un an maximum), il permet la couverture des besoins de trésorerie à court terme. En 2023, le programme de dette court terme (NEU CP) a été fortement sollicité afin de couvrir les besoins de trésorerie à court terme, dont le refinancement partiel et temporaire des emprunts de moyen et long terme arrivant à échéance en avril et novembre 2023, mais aussi pour financer la non-compensation partielle des exonérations de cotisations pour l’Assurance chômage intervenues en fin d’année.
    • Le programme NEU MTN (Negociable EUropean Medium Term Note) : TCN de moyen terme flexible, il est un complément aux autres programmes de financement. Ce programme n’a pas été sollicité en 2023.
    • Le programme EMTN (Euro Medium Term Note) : financement de la dette de l'Assurance chômage permettant la couverture des déficits prévisionnels et le refinancement des emprunts obligataires. Les emprunts réalisés via ce programme sont réservés aux maturités de long terme (maximum 15 ans) et nécessitent la garantie explicite de l'État. Cette garantie est autorisée par un article en loi de finances et les émissions obligataires peuvent être réalisées après la publication d'un arrêté du ministre chargé des Finances. Une seule émission obligataire a été exécutée via le programme EMTN de l’Unédic en 2023, pour un montant d’un milliard d’euros.

Une lecture des comptes plus complexe

La non-compensation partielle des exonérations de cotisations d’assurance chômage à hauteur de 2 milliards d’euros en 2023 avait pour objet, comme annoncé par l’État, le financement de France Compétences et de France Travail. Elle a donné lieu à un versement de trésorerie de l’Unédic à l’Urssaf Caisse nationale en toute fin d’année. Toutefois, l’absence de mention de la destination des fonds dans les textes juridiques n’a pas permis de traduire comptablement ce prélèvement dans les charges du régime. Ce prélèvement est ainsi présenté dans les états financiers 2023 de l’Unédic en minoration des contributions principales, ce qui en complexifie la lecture.

Des coûts accrus pour le régime

L’Unédic contribue aux charges de fonctionnement de son opérateur France Travail à hauteur de 11 % de ses recettes. Cette participation est calculée sur la base des encaissements des contributions d’assurance chômage de l’exercice N-2 et est calculée sur une assiette avant application de la non-compensation partielle des allégements généraux. L’Unédic devra donc verser à ce titre 11% des non-compensations partielles à compter de l’exercice 2025.

L’Urssaf Caisse nationale a appliqué en 2023 un taux de non-recouvrement sur les sommes non-compensées à hauteur de 1,1%, portant la réduction des produits de l’Unédic à 2 022 millions d’euros.

Coût global de la non compensation partielle

En millions d'euros2023202420252026
Non-compensation partielle de la Réduction générale-2000-2600-3350-4100
Financement de France Travail-220-286-369-451
Application d'un taux de non-recouvrement-22-29-37-45
Surcoût de financement-13-115-202-285
Coût total-2255-3030-3957-4881

Ainsi, la non-compensation partielle de 2 milliards d’euros en 2023 représentera in fine un coût global de près de 2,3 milliards d’euros. En l’état actuel de la réglementation, l’impact pour les finances du régime se poursuivra et s’additionnera dans les années futures.

Alors que le régime est endetté, cette non-compensation partielle engendre un surcoût lié au besoin de financement des sommes non-perçues. Ces dépenses financières supplémentaires pour l’Unédic ont été évaluées à 13 millions d’euros en 2023.

Des dépenses d’intérêt en hausse

Les prélèvements sur les recettes diminuent les capacités de l’Assurance chômage à se désendetter. Alors qu’elle n’avait procédé qu’à une seule émission obligataire – en format Social Bond – pour 1 milliard d’euros en avril 2023, l’Unédic a été contrainte d’emprunter en fin d’année sur les marchés financiers, dans une période de taux d’intérêt élevés, afin de financer la non-compensation partielle des exonérations de cotisations d’assurance chômage. Après deux années de forte sollicitation des marchés financiers, l’année 2023 s’est inscrite dans un contexte de poursuite du resserrement monétaire débuté en 2022 dans les grandes zones économiques mondiales dans le but d’endiguer l’inflation. Au total, la hausse des taux directeurs en zone euro s’élève à 450 points de base entre mi-2022 et fin 2023.

En conséquence, alors même que le désendettement de l’Assurance chômage se poursuit, les dépenses d’intérêt sont accrues : le coût supplémentaire du financement des prélèvements (augmentation des dépenses d’intérêts) atteindrait en cumulé un milliard d’euros entre 2023 et 2027.

En 2022 et 2023, le retour aux excédents et la diminution du recours à l’émission de dette moyen et long terme sur les marchés financiers ont tout de même permis une baisse de leur encours respectifs. Par conséquent, sur cette même période, la maturité moyenne de l’encours de dette moyen et long terme s’est réduite, passant de 6 ans et 11 mois à 5 ans et 11 mois.

L’objectif : maintenir une gestion maîtrisée et efficiente du régime

« La capacité à maintenir une gestion maîtrisée et efficiente du régime, dans le sillage du pilotage financier des partenaires sociaux, est essentielle pour que l’Unédic continue à exercer ses missions et pour que l’Assurance chômage puisse jouer son rôle d’amortisseur économique et social. Dérèglement climatique, intelligence artificielle… le marché du travail est en pleine effervescence. C’est pourquoi il est nécessaire d’avoir des perspectives claires pour accompagner et sécuriser les transitions professionnelles dans de bonnes conditions », explique Christophe Valentie, directeur général de l’Unédic, dans son rapport de gestion.

En 2024, « l’Unédic continuera à réaliser des études et des analyses sur l’Assurance chômage pour informer et éclairer les partenaires sociaux et les Français », ajoute Christophe Valentie. « L’Unédic continuera à sécuriser les règles d’assurance chômage et à veiller à leur bonne application dans les territoires. L’Unédic continuera à garantir le financement du régime pour que les demandeurs d’emploi perçoivent leurs allocations chaque mois. L’Unédic continuera donc à gérer le régime d’assurance chômage pour sécuriser les transitions professionnelles des actifs ».

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