La réglementation d’assurance chômage n’est pas figée : elle est régulièrement renégociée par les partenaires sociaux, afin de prendre en compte les évolutions de la conjoncture économique et du marché du travail. Depuis 2018, ces négociations se tiennent sous l’égide d’une lettre de cadrage émanant du gouvernement. Dans le cas où les organisations syndicales et patronales ne parviennent pas à s’entendre, l’Etat définit les règles d’assurance chômage par décret : c’est le régime de carence, en place de 2019 à 2024. Depuis la signature de la convention d’assurance chômage du 15 novembre 2024 et son agrément par le Premier ministre permettant une entrée en vigueur au 1er janvier 2025, ce sont de nouveau les partenaires sociaux qui définissent la réglementation.
A l’aube de l’application des mesures de cette nouvelle convention, prévue pour l’essentiel au 1er avril 2025, se pose la question de la rapidité avec laquelle ces dispositions vont se déployer pour les allocataires de l’Assurance chômage. Afin d’expliquer comme se passe cette « montée en charge », cette publication propose d’examiner comment, par le passé, se sont déroulées les montées en charge des réglementations successives.
Pour comprendre : les mesures de la convention d'assurance chômage du 15 novembre 2024 en détails
Dans la plupart des cas, la réglementation nouvellement entrée en vigueur s’applique uniquement aux nouveaux entrants dans le régime d’assurance chômage, c’est-à-dire aux personnes dont la date de fin de contrat est postérieure à la date d’entrée en vigueur de cette réglementation. Cela signifie que, pendant plusieurs mois, la population d’allocataires pris en charge par l’Assurance chômage compte une majorité de personnes relevant de réglementations antérieures. Le « régime de croisière » est atteint lorsque la plupart des allocataires pris en charge relèvent de la réglementation considérée. Cette phase peut durer plusieurs années.
Une montée en charge progressive, au fil des ouvertures de droit
Le Graphique 1 présente le nombre d’allocataires en cours de droit, selon la règle utilisée pour calculer leur droit. Il y apparaît que les effectifs concernés par une réglementation donnée augmentent de manière progressive, au fil des nouvelles ouvertures de droit, mais aussi qu’une part d’allocataires relevant de réglementations plus anciennes peut subsister parmi les effectifs pendant des années.
Graphique 1 - Nombre d’allocataires en cours de droit, selon la règle utilisée pour calculer leur droit
Selon les mesures, des effets qui peuvent être immédiats, différés ou très lointains
La montée en charge doit aussi être considérée en fonction des différentes mesures composant une réglementation donnée. Le Schéma 1 montre comment s’est déroulée l’entrée en vigueur des réglementations 2019-2021 (à l’exception d’une partie des mesures d’urgence liées à la crise Covid-19) et du décret 2023, qui module la durée d’indemnisation en fonction de la conjoncture.
- Lorsqu’une mesure intègre un délai, il faut logiquement attendre qu’il soit écoulé pour en observer les effets. Ainsi, en décembre 2021, la dégressivité des allocations au 7e mois prévue par la réglementation 2019-2021 pour les allocataires qui percevaient des salaires de plus de 4916 € par mois avant leur inscription à France Travail est entrée en vigueur. Les premières allocations dégressives n’ont toutefois été versées que 7 mois plus tard, mi-2022.
- D’autres mesures produisent des effets dès leur entrée en vigueur, mais uniquement sur les nouveaux entrants : pour la réglementation 2019-2021, ce fut le cas de la modification du calcul de l’allocation et du passage de 4 à 6 mois de la condition d’ouverture de droit.
Schéma 1 - Calendrier des réformes 2019-2021 et 2023 et premiers effets observables
Il faut bien noter que l’apparition des premiers effets observables ne signe que le début de la montée en charge : à ce stade, la part d’allocataires concernés par ces effets demeure très faible par rapport à l’ensemble des effectifs de l’Assurance chômage. Dans certains cas, la pleine montée en charge des mesures peut prendre des années.
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Et la convention du 15 novembre 2024 ?
Lire l'étude d'impactL’essentiel des mesures prévues par la convention d’assurance chômage du 15 novembre 2024 s’applique à compter du 1er avril 2025. Parmi ces dispositions, certaines auront un effet immédiat pour l’ensemble des allocataires, y compris ceux qui sont déjà inscrits : c’est le cas de la mensualisation des allocations. La plupart des mesures de la convention, cependant, ne s’appliqueront qu’aux nouveaux entrants, à savoir les personnes ouvrant un droit à partir de la date d’entrée en vigueur des mesures. La pleine montée en charge de la plupart de ces dispositions prendra 4 à 5 années. Pour une partie des mesures, la montée en charge sera plus lente. C’est le cas du décalage progressif de l’âge d’accès au dispositif de maintien des droits, de 62 à 64 ans : le régime de croisière sera atteint en 2035 selon l’étude d’impact de l’Unédic.