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A propos des mesures annoncées par le gouvernement
Les éléments présentés dans ces prévisions financières du mois de juin 2024 ne tiennent pas compte des effets des mesures annoncées par le gouvernement fin mai. Ces mesures pourront faire l’objet d’une étude d’impact une fois les mesures définitives précisément connues (voir Encadré).
L'économie manquerait de souffle en 2024 : elle ne devrait connaître qu'une croissance modeste de +0,8%, après +1,1% en 2023. La croissance repartirait en 2025 (+1,2%), puis plus franchement en 2026 (+1,5%) et 2027 (+1,4%), selon le Consensus des économistes. La page de l'inflation est en passe d'être tournée : d'un niveau de +2,5% en 2024, elle serait ensuite inférieure à 2% jusqu'en 2027, signe d'un retour à la stabilité des prix.
Après un rebond de l'emploi au 1er trimestre 2024, les créations nettes d'emploi se poursuivraient le reste de l'année (+100 000, un rythme comparable à celui observé en 2023). En 2025, les créations nettes atteindraient +112 000. Une accélération surviendrait en 2026 (+180 000) et en 2027 (+182 000).
2,3 millions de demandeurs d'emploi seraient indemnisés fin 2027
Dans ce contexte, et sans prise en compte des effets des nouvelles mesures annoncées par le gouvernement (voir Encadré), les effectifs de chômeurs indemnisés atteindraient fin 2024 un niveau proche de celui observé fin 2023 (2,6 millions de personnes). À partir de 2025, ce nombre diminuerait pour atteindre 2,3 millions fin 2027, sous l'effet de la pleine montée en charge de la réforme 2023 de l'Assurance chômage.
Les recettes de l'Assurance chômage sont lourdement affectées par les prélèvements prévus par l'État, pour un total de 12,05 Md€ entre 2023 et 2026. Ainsi, les recettes s'élèveraient à 45,7 Md€ en 2024 (après prélèvement de 2,6 Md€ par l'État), 46,1 Md€ en 2025 (après prélèvement de 3,4 Md€) et 46,6 Md€ en 2026 (après prélèvement de 4,1 Md€). Aucun prélèvement n'a été programmé à ce stade pour l'année 2027, les recettes s'élèveraient alors à 51,9 Md€.
Après une augmentation à 44,8 Md€ en 2024, les dépenses de l'Assurance chômage diminueraient, s'établissant à 40,2 Md€ en 2027. Cette diminution globale cache un fait notable : les dépenses d'intérêts, liées à la gestion financière du régime, augmenteraient, pour un coût supplémentaire de près de 1 Md€ en cumul entre 2023 et 2027. En effet, les prélèvements de l'État sur les recettes de l'Unédic contraignent le régime à emprunter pour faire face à ses engagements financiers.
« La non compensation partielle des exonérations de cotisations, qualifiées ici de prélèvements de l’Etat, pèse dans ces prévisions financières. Les recettes du régime baissent arithmétiquement, affectant notre capacité à nous désendetter. Nous allons devoir réemprunter pour financer ces moindres recettes », déplore Jean-Eudes Tesson, président de l'Unédic.
« La situation financière est tendue. Les économies devraient servir à désendetter le régime, y compris sans avoir à engager de nouveaux emprunts, de façon à ce que le régime puisse jouer pleinement son rôle d’amortisseur économique et social », ajoute Patricia Ferrand, vice-présidente de l'Unédic.
Des soldes financiers positifs de 2024 à 2027, malgré les prélèvements de l'État
Des soldes positifs sur l'horizon de prévision permettraient la poursuite du désendettement du régime, mais à un rythme inférieur à ce qu'il aurait été hors prélèvements de l'État : de 58,4 Md€ fin 2024, l'endettement net chuterait à 38,2 Md€ fin 2027 (année pour laquelle aucun prélèvement n'est prévu à ce stade).
Note : l’Unédic retient comme hypothèses de croissance et d’inflation les prévisions du Consensus des économistes, moyenne des prévisions d’une vingtaine d’instituts et banques, publiées chaque mois. La présente prévision repose ainsi sur les publications du Consensus des économistes parues le 11 avril pour 2026 et 2027 et le 16 mai 2024 pour 2024 et 2025.
Les effets potentiels de la loi Plein emploi prévoyant une inscription généralisée auprès de France Travail en 2025, notamment des bénéficiaires du RSA, ne sont pas intégrés dans cet exercice de prévision.
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Encadré - Effets potentiels de la nouvelle réforme de l’Assurance chômage annoncée (réforme 2024)
Le gouvernement a annoncé une nouvelle réforme de l’Assurance chômage et soumis à consultation un projet de décret, amené à être publié d’ici le 30 juin, avec des mesures qui entreraient en vigueur le 1er décembre 2024.
Une des principales mesures est le passage de 6 à 8 mois de la condition d’ouverture de droit combiné à une diminution de la période sur laquelle est recherchée cette condition. Il en découle une réduction de la durée d’indemnisation maximale de droit qui est à l’origine de la plus grande partie des économies que produirait cette réforme : dès l’entrée en vigueur de ces dispositions, les ouvertures de droit seront moins nombreuses conduisant rapidement à des moindres dépenses, le raccourcissement de la durée de droit ayant des effets plus importants un peu plus tard (quand les personnes atteignent une fin de droit plus précoce).
Plusieurs mesures concerneraient les seniors : relèvement des bornes d’âge de la « filière seniors » et du dispositif de « maintien », et conditions de cumul allocation-revenu plus favorables pendant un an (« bonus seniors »). Si le décalage des bornes d’âge représente des économies significatives, elles se manifesteraient plutôt sur la fin de l’horizon de prévision tandis que le « bonus seniors » occasionne dès la première année un peu plus de dépenses d’indemnisation.
Une autre mesure qui pourrait avoir un effet financier important consisterait en une limitation du capital de droit mobilisable par les allocataires exerçant une activité non salariée, en vue de limiter les effets d’aubaine. Le texte introduirait par ailleurs une adaptation du versement des allocations journalières prévu dorénavant sur 30 jours (« mensualisation »). Par ailleurs, d’autres dispositions, aux effets financiers de moindre ampleur, sont également prévues, par exemple sur les conditions de versement de l’ARCE, l’automatisation de l’aide de fin de droit ou encore la prise en compte de l’emploi en détention.
A ce stade, l’Unédic estime que les économies générées par l’ensemble de ces mesures pourraient se situer entre 3,2 Md€ et 4,4 Md€ en 2027. En régime de croisière, quand la pleine montée en charge serait atteinte d’ici 4 à 5 ans, ces mesures représenteraient entre 4,0 Md€ et 5,4 Md€ de moindres dépenses par an. Le projet de texte doit néanmoins encore être expertisé pour affiner certains chiffrages, particulièrement pour le régime de croisière, notamment celui de la mesure concernant l’activité non salariée en cours de droit. L’ensemble des mesures pourraient faire l’objet d’une étude d’impact une fois les mesures définitives entièrement connues.
A noter que de moindres dépenses d’allocations entrainent mécaniquement des moindres versements par l’Unédic aux caisses de retraite complémentaire, amplifiant de 6 % environ les économies pour le régime d’assurance chômage.
Enfin, le décret devrait introduire un nouveau régime de contracyclicité induisant une réduction des durées de droit de 40 % (au lieu de 25 % actuellement) dès lors que le taux de chômage BIT passerait en dessous de 6,5 % sur 2 trimestres consécutifs. Toutefois, au regard de nos prévisions actuelles, cette règle n’entrerait pas en vigueur sur l’horizon de la prévision.