Conventions d’assurance chômage

Protocole d'accord du 10 novembre 2023 tel que modifié par l'avenant du 14 novembre 2024 (version consolidée)

14 novembre 2024

Protocole d'accord du 10 novembre 2023

relatif à l'assurance chômage, tel que modifié par l'avenant du 14 novembre 2024 (version consolidée)

Préambule

Le marché du travail français est aujourd’hui confronté à une situation inédite.

Le dynamisme des créations d’emplois en 2021 et 2022 s’est traduit par une baisse sensible du taux de chômage qui s’établissait au 2ème trimestre 2023 à 7,2% de la population active, soit 3,3 points de moins que son pic de mai 2015. Dans ce contexte, les entreprises font face à d’importantes difficultés de recrutement qui se font désormais ressentir dans quasiment tous les secteurs.

Par ailleurs, les enjeux de transformation de notre économie, que ce soit pour répondre aux défis des transitions écologiques et numériques notamment ainsi que d’organisation des relations de travail sont nombreux. Ils appellent des réponses adaptées, y compris en termes de sécurisation des parcours professionnels et d’accompagnement des transitions et reconversions.

Dans ce contexte, les organisations de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ont engagé une négociation en vue de réviser les règles d’assurance chômage à la suite du document de cadrage transmis le 31 juillet 2023 par la Première ministre.

Ce document de cadrage a été élaboré sur la base de prévisions financières pour le régime d’assurance chômage qui sont apparues comme erronées. Les organisations de salariés et d’employeurs, gestionnaires du régime d’assurance chômage depuis 1958, ont donc décidé de conduire leurs discussions sur la base des prévisions actualisées par l’Unédic dans un esprit de responsabilité.

A ce titre, les ponctions envisagées par l’Etat sur les ressources de l’assurance chômage (que ce soit au travers du projet de loi de fin de gestion, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ou du relèvement de la contribution Unédic à Pôle emploi) posent une double difficulté :

D’une part, une question de principe : de telles décisions brouillent davantage les responsabilités entre l’Etat et les partenaires sociaux et appellent à une remise à plat de l’architecture de l’assurance chômage et une clarification des responsabilités.

D’autre part, au regard des montants envisagés, ces ponctions obèrent la capacité de l’Unédic à faire face aux échéances de remboursement de la dette telles que prévues pour les années 2023-2026. Cela mettrait à mal la crédibilité de l’Unédic vis-à-vis des investisseurs et fragiliserait la pérennité financière du régime d’assurance chômage.

Dans ce cadre fixé, et tenant compte des prévisions financières réalistes établies par l’Unédic pour le régime d’assurance chômage à horizon 2026, les organisations de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel conviennent des modifications suivantes, dans une optique de désendettement du régime et d’équilibre financier entre dépenses supplémentaires et mesures d’économies. Ces évolutions répondent à un triple objectif :

l’ajustement de certaines règles d’indemnisation pour tenir compte de situation spécifique sur le marché du travail (chapitre I) ;

la simplification et l’amélioration de la lisibilité de la réglementation d’assurance chômage, pour plus d’équité (chapitre II) ;

l’amélioration de la compétitivité des entreprises au profit de l’emploi durable (chapitre III).

CHAPITRE I : Ajuster certaines règles d’indemnisation pour tenir compte de situations spécifiques sur le marché du travail sans remettre en cause les principes fondamentaux des réformes précédentes visant à inciter au retour durable à l’emploi

Article 1 - Ajuster certaines règles d’indemnisation pour mieux tenir compte de la situation des publics les plus fragiles

Afin de tenir compte et de limiter certains impacts de la réforme intervenue en 2019 et mise en œuvre à partir de 2021 sur les publics les plus fragiles – en particulier les primo-entrants sur le marché du travail et les travailleurs saisonniers – tout en préservant son objectif d’incitation à la reprise d’emploi durable, les signataires du présent protocole d’accord conviennent d’ajuster les règles relatives aux conditions d’ouverture de droit et au calcul de l’allocation.

La durée d’indemnisation minimale est fixée dans ce cas à 5 mois (152 jours).

Les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics de procéder, le cas échéant, aux modifications législatives et réglementaires nécessaires à la mise en œuvre du présent article.

1.1 - Evolution de la condition minimale d’affiliation permettant l’ouverture d’un droit à l’assurance chômage pour les primo-entrants sur le marché du travail

Afin de mieux sécuriser la situation des primo-entrants sur le marché du travail, la condition minimale d’affiliation permettant l’ouverture d’un droit est abaissée de manière dérogatoire au droit commun à 108 jours travaillés (ou 758 heures travaillées) pour les personnes n’ayant jamais été indemnisées au titre de l’ARE.

La durée d’indemnisation minimale est fixée dans ce cas à 5 mois (152 jours).

Les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics de procéder, le cas échéant, aux modifications législatives et réglementaires nécessaires à la mise en œuvre du présent article.

1.2 - Evolution de la condition minimale d’affiliation permettant l’ouverture d’un droit à l’assurance chômage pour les salariés en contrats saisonniers

Afin de mieux sécuriser la situation des saisonniers sur le marché du travail, la condition d’affiliation est abaissée, par dérogation, à 108 jours travaillés ou 758 heures travaillées pour les travailleurs saisonniers justifiant de cette durée d’affiliation exclusivement au titre de contrats saisonniers (soit 5 mois).

La durée d’indemnisation minimale est fixée dans ce cas à 5 mois (152 jours).

1.3 - Ajustement de la formule de calcul du salaire journalier de référence servant au calcul de l’allocation journalière

Afin de mieux tenir compte des spécificités de certaines activités saisonnières, le plafond des périodes non travaillés prises en compte dans le calcul du salaire journalier de référence est abaissé à 70% du nombre de jours travaillés dans la période de référence.

Article 2 - Mieux adapter le mécanisme de dégressivité de l’allocation aux réalités du marché du travail

Afin de mieux tenir compte de la réalité des situations d’emploi et de la capacité des demandeurs d’emploi séniors à retrouver rapidement et durablement un emploi, les parties signataires entendent ajuster les règles relatives à la dégressivité.

Par conséquent : le coefficient de dégressivité est appliqué aux allocataires de moins de 55 ans à la date de fin du contrat de travail.

Article 3 - Ajuster les règles spécifiques d’indemnisation pour améliorer le taux d’emploi des séniors

Dans l’objectif d’améliorer le taux d’emploi des séniors, les parties signataires conviennent d’adapter la règlementation pour tenir compte de l’allongement des carrières et sécuriser la reprise d’emploi durable pour les demandeurs d’emploi séniors. Les dispositions du présent article supposent la mise en place effective de la loi n°2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 qui a porté l’âge légal de départ en retraite à 64 ans.

3.1 - Décaler les bornes d’âge pour l’entrée dans la filière spécifique d’indemnisation

Aujourd’hui, les allocataires âgés de 53 ans ou plus à leur fin de contrat bénéficient d’une période de recherche de l’affiliation de 36 mois pour les salariés âgés de 53 ans et plus à la date de fin de contrat de travail contre 24 mois pour le droit commun, et de durées d’indemnisation plus longues : depuis le 1er février 2023, 22,5 mois pour les 53-54 ans, 27 mois pour les 55 ans et plus contre 18 mois pour les allocataires de moins de 53 ans.

Les organisations signataires conviennent de faire évoluer les bornes d’âge pour l’entrée dans la filière d’indemnisation (âges à partir desquels la durée maximum de droit est allongée) comme suit :

30 mois, durée initiale avant l’application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit 22,5 mois d’indemnisation maximum (30 mois pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte) pour les allocataires âgés de 55 et 56 ans à la date de fin du contrat de travail ;

36 mois, durée initiale avant l’application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit 27 mois d’indemnisation maximum (36 mois pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte) pour les allocataires âgés de 57 ans et plus à la date de fin du contrat de travail ;

les demandeurs d’emploi âgés de 55 ans et plus à la date de fin de contrat de travail bénéficient d’une période de recherche de l’affiliation de 36 mois.

3.2 - Décaler l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein

La règlementation d’assurance chômage actuelle prévoit un mécanisme de maintien des droits, sous certaines conditions, à compter de l’âge légal de la retraite et jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein.

Ainsi, en cohérence avec l’évolution progressive de l’âge légal de départ à la retraite jusqu’à 64 ans en 2030, il est procédé au décalage progressif jusqu’à 64 ans de l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein.

3.3 - Allonger la durée d’indemnisation en cas de formation pour l’ensemble des demandeurs d’emploi de 55 ans et plus, dans la limite de 137 jours

Les règles actuellement en vigueur prévoient pour les demandeurs d’emploi de 53 et 54 ans une durée d’indemnisation plus longue – jusqu’à 182 jours avant application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit jusqu’à 137 jours supplémentaires selon les conditions actuelles (182 jours pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte, le coefficient lié à la contracyclicité n’y étant pas appliqué) – en cas de formation validée par France Travail (anciennement Pôle emploi) ou financée par le CPF.

Afin de créer les conditions optimales d’une reprise d’emploi durable pour les demandeurs d’emploi séniors et de faciliter leur accès à la formation, ce dispositif est appliqué dans les même conditions pour l’ensemble des demandeurs d’emploi âgés de 55 ans et plus à la date de fin de leur contrat de travail qui suivent une formation en cours d’indemnisation ayant donné lieu à une indemnisation en ARE ou AREF.


CHAPITRE II - Simplifier et améliorer la lisibilité et l’efficacité de la réglementation d’assurance chômage

Article 4 - Rendre plus lisible et plus efficace les règles d’indemnisation en cas de démission post reprise d’emploi afin de sécuriser la mobilité professionnelle

La réglementation relative à l’assurance chômage prévoit les situations dans lesquelles le caractère volontaire du chômage n’est pas opposé à la personne pour l’ouverture ou la poursuite de l’indemnisation. Néanmoins, dans certains cas, la rupture de la période d’essai à l’initiative du salarié dans le cadre d’un emploi repris en cours de droit conduit à une interruption de l’indemnisation.

Considérant que le rôle de l’assurance chômage est d’inciter à la reprise d’emploi tout en la sécurisant, il est procédé aux évolutions réglementaires suivantes : en cas de reprise d’activité en cours d’indemnisation, l’appréciation du caractère involontaire du chômage lors de l’examen en vue d’une reprise ou une poursuite de l’indemnisation n’est effective qu’en cas de rupture du contrat de travail intervenant après 4 mois d’emploi (88 jours travaillés ou 610 heures).

Article 5 - Simplifier et améliorer la prévisibilité de l’indemnisation en mensualisant le versement de l’allocation

Le versement de l’allocation est réalisé sur une base calendaire. Cela conduit à une variation du montant mensuel d’allocations versé en fonction du nombre de jours du mois concerné.

Les organisations signataires conviennent des modalités de versement suivantes : sans préjudice du capital de droits, le versement de l’allocation se fait sur la base de 30 jours calendaires, quel que soit le mois concerné.

Enfin, cette mesure est appliquée à l’ensemble des allocataires relevant du droit commun, y compris ceux en cours d’indemnisation au moment de l’entrée en vigueur de cette disposition.

Article 6 - Rendre plus efficace l’indemnisation des demandeurs d’emploi créateurs / repreneurs d’entreprise

Les dispositifs d’aides et d’indemnisation en cas de création/reprise d’entreprise permettent dans la grande majorité des cas une reprise d’activité durable, et par conséquent une sortie pérenne du chômage, avec des impacts positifs en termes de création d’emploi sur le moyen terme. Néanmoins, dans certaines situations, ces dispositifs peuvent susciter des effets d’aubaine pour leurs bénéficiaires.

Afin de limiter ces effets, les organisations signataires du présent protocole d’accord conviennent des mesures opérationnelles suivantes :

l’accès aux données (notamment concernant les chiffres d’affaires, les bénéfices, les dividendes éventuellement versées, etc.) relatives aux activités non salariées créées ou reprises préalablement ou en cours de versement de l’ARE est facilitée pour Pôle emploi afin de renforcer les capacités de contrôle, et auprès de l’Unédic à des fins de suivi de la réglementation et d’études ;

s’agissant des modalités de versement de l’ARE en cas de cumul avec des revenus perçus au titre d’une activité non salariée créée ou reprise, il est rappelé que dans le cadre de l’actualisation de sa situation, l’allocataire créateur ou repreneur est tenu de déclarer son statut auprès de Pôle emploi pour bénéficier du dispositif ; il perçoit mensuellement un montant équivalent à 70% de l’ARE qui lui aurait été versée en l’absence de reprise d’activité ; ces règles sont complétées par les dispositions suivantes :

la durée de versement est plafonnée à 60% du reliquat de droits à la date de déclaration auprès de Pôle emploi comme créateur / repreneur de l’entreprise ; le capital de droits n’est pas modifié : les 40% restants peuvent être, le cas échéant, versés dans le cadre d’une reprise de l’indemnisation dans les cas prévus par la réglementation en vigueur ;

lorsque les versements atteignent 60% des droits, l’allocataire peut toutefois solliciter un examen de sa situation auprès de l’instance paritaire régionale dont il relève afin d’envisager une éventuelle poursuite des versements, sur la base de justificatifs d’absence totale de revenus perçus au titre de l’activité non salariée créée ou reprise.

les modalités de versement de l’Aide à la reprise et à la création d’entreprise (ARCE) sont modifiées comme suit :

il n’est pas procédé au second versement de l’ARCE lorsqu’il est constaté à cette date que l’allocataire a repris un contrat de travail en CDI à temps plein ;

à cette fin, il est demandé au bénéficiaire de l’ARCE d’attester qu’il n’a pas repris de CDI à temps plein en même temps qu’il atteste poursuivre son activité de créateur ou repreneur d’entreprise.

Article 7 - Autres mesures de simplification visant à améliorer l’accès aux droits

7.1 - Revoir les modalités de versement de l’allocation décès et de l’aide de fin de droits

Afin de faciliter le versement de l’allocation décès et de l’aide de fin de droits, les organisations signataires conviennent des évolutions réglementaires et opérationnelles suivantes :

s’agissant de l’allocation décès :

le fait que l’allocataire soit en arrêt maladie au moment de son décès ne peut pas faire obstacle au versement de cette allocation ;

par ailleurs, cette allocation est versée à l’ayant droit de l’allocataire défunt ; la notion d’ayant droit recouvre tout conjoint marié ou vivant maritalement, pacsé, tuteur des enfants, concubin, parent d’enfant(s) en commun né(s) ou à naître ;

s’agissant de l’aide de fin de droits, celle-ci est versée automatiquement à la fin de droits à l’assurance chômage dès lors que les conditions requises sont remplies.

7.2 - Dispositions relatives à la condition de résidence et à l’exercice d’une activité à l’étranger

Aujourd’hui, la notion de résidence dans la règlementation d’assurance chômage n’est pas expressément définie. Par ailleurs, le règlement européen de coordination des systèmes de sécurité sociale permet au demandeur d’emploi en situation de chômage complet indemnisé dans un Etat membre (UE/EEE/Suisse), de bénéficier du maintien de son droit aux allocations de chômage dans la limite de 3 mois lorsqu’il se rend dans un autre Etat membre (UE/EEE/Suisse) pour y exercer un emploi.

Afin de renforcer la lisibilité de la règlementation, les organisations signataires conviennent des dispositions suivantes :

la condition de résidence sur le territoire des personnes indemnisées à l’assurance chômage est complétée par la présence effective sur le territoire français pendant une période de plus de 6 mois au cours de l’année civile ;

en adéquation avec le dispositif de maintien du droit aux prestations de chômage prévu par la règlementation européenne, la durée du cumul de l’ARE avec une rémunération issue de l’exercice d’une activité professionnelle exercée à l’étranger est limitée à une période de 3 mois ;

l’ensemble des dispositions relatives aux salariés expatriées sont revues pour leur appliquer pleinement, et dans la mesure du possible, les règles d’indemnisation de droit commun.

7.3 - Revoir les modalités d’application du délai de déchéance des droits

Afin de rendre l’application du délai de déchéance des droits plus juste et plus efficace, les organisations signataires du présent protocole accord conviennent des dispositions suivantes :

le délai de déchéance des droits est vérifié tous les mois en cours d’indemnisation et plus uniquement au moment de l’examen en vue d’une reprise de droits comme c’est le cas aujourd’hui ;

les périodes de maladie, donnant lieu au versement d’indemnités journalières de sécurité sociale, de congés maternité et paternité, ou les périodes de formation sont considérés comme des cas d’allongement du délai de déchéance : à ce titre, il est prévu la suspension du délai pendant ces périodes.

7.4 - Revoir les sanctions applicables en cas de périodes d’emploi non déclarées pour les demandeurs d’emploi non indemnisés

Les demandeurs d’emploi doivent, à l’occasion de l’actualisation, porter à la connaissance de Pôle emploi tout évènement affectant leur inscription sur la liste des demandeurs d’emploi, dont l’exercice d’une activité professionnelle, qu’elle soit occasionnelle ou réduite et quelle que soit sa durée (articles L.5411-2 et R.5411-6 du code du travail).

La sanction prévue par l’article L5426-1-1 du code du travail, vise l’absence de déclaration d’une reprise d’activité de plus de 3 jours, et prévoit, d’une part, la non-prise en compte de cette période dans la recherche de l’affiliation nécessaire à l’ouverture d’un droit ou au rechargement d’un droit épuisé, d’autre part, la non-prise en compte des rémunérations de la période non déclarée dans le salaire de référence.

Elle a pour objectif d’inciter les demandeurs d’emploi indemnisés à déclarer leurs périodes d’activité afin de limiter les indus liés au versement d’un montant d’allocation d’assurance qui ne tient pas compte de la reprise d’activité, laquelle aurait dû se traduire par un montant moindre ou l’absence de versement.

Cette sanction est appliquée à tous les demandeurs d’emploi, y compris à ceux qui ne sont pas indemnisés, alors même qu’une omission de déclaration de ces derniers ne génère aucun indu puisqu’ils ne perçoivent aucune allocation. En effet, la rédaction actuelle de l’article L. 5426-1-1 du code du travail ne permet pas de distinguer les allocataires des demandeurs d’emploi non indemnisés.

Tout en préservant l’obligation de déclarer une activité professionnelle pour toutes les personnes inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi, les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics de procéder aux évolutions législatives et réglementaires visant à éviter que des demandeurs d’emploi qui ne touchent aucune indemnité ne se retrouvent financièrement sanctionnés dans le futur.


CHAPITRE III - Améliorer la compétitivité des entreprises au profit de l’emploi durable

Article 8 - Suppression de la contribution exceptionnelle temporaire mise en place par le protocole d’accord du 28 mars 2017 relatif à l’assurance chômage

En son article 2.2, le protocole d’accord du 28 mars 2017 prévoyait la mise en place d’une contribution exceptionnelle de 0,05% « pour une durée maximale de 36 mois ».

Conformément aux dispositions du protocole d’accord du 28 mars 2017, et de la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage, cette contribution exceptionnelle temporaire est donc supprimée à compter du 1er mai 2025.

Article 9 - Ajuster le dispositif de bonus-malus

Pour mémoire, dans un objectif initial de limitation du recours aux contrats courts, le décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d'assurance chômage a instauré un système dit de « bonus-malus » appliqué aux contributions patronales d’assurance chômage pour les entreprises de 11 salariés et plus, appartenant à certains secteurs d’activité.

Afin de palier certaines limites opérationnelles du dispositif, les organisations signataires conviennent d’envisager les ajustements suivants.

9.1 - Revoir le périmètre des fins de contrats de travail prises en compte

Aujourd’hui, le bonus-malus comptabilise toutes les séparations donnant lieu à inscription à Pôle emploi, sauf exception. Toutefois, de nombreuses ruptures sont indépendantes de la volonté des employeurs qui se trouvent ainsi pénalisés.

Afin de corriger ce phénomène, les fins de contrat de travail suivantes ne sont pas prises en compte dans l’application du bonus-malus :

fins de CDD ou CTT de remplacement ;

contrats saisonniers ;

ruptures conventionnelles ;

licenciements pour inaptitude non professionnelle ;

licenciements à la suite d’une faute lourde.


Par ailleurs, afin de recentrer le dispositif sur son objectif premier, seules les fins de contrat de travail d’une durée inférieure à 1 mois sont prises en compte.

9.2 - Ajuster au sein des secteurs sélectionnés le périmètre de comparaison des taux de séparation servant à la modulation du taux de contribution

Le taux de contribution d’une entreprise relevant d’un secteur concerné par le dispositif de bonus-malus est modulé en fonction de l’écart constaté de son taux de rupture au taux de rupture médian du secteur. Toutefois, la maille sectorielle utilisée, très large, englobe au sein d’un même secteur des activités économiques très hétérogènes et ne permet pas d’assurer des comparaisons pertinentes.

Pour limiter cet effet, les organisations signataires conviennent des dispositions suivantes :

les modalités de sélection des secteurs d’activité concernés sur la base des taux de séparation moyens au niveau NAF 38 sont préservées ;

les règles relatives à la comparaison sectorielle des taux de séparation des entreprises sont appliquées au niveau des sous-classes A732 ;

par ailleurs, les sous-classes A732 dont le taux moyen de séparation serait sensiblement éloigné du taux moyen sectoriel apprécié au niveau de la section NAF 38 dont elles relèvent, sont exclues du champ d’application du dispositif.


9.3 - Adapter la formule de calcul au nouveau taux de contribution employeur

En cohérence avec l’article 5 du présent protocole d’accord, la formule de calcul des taux de contribution modulés est adaptée afin de préserver l’équilibre permettant au dispositif d’être financièrement neutre.

9.4 - Modalités d’application du présent article

Considérant la nécessité de disposer d’une analyse d’impacts financiers et opérationnels précise de l’ensemble de ces évolutions, les organisations signataires conviennent de mettre en place un groupe de travail afin de définir les modalités de mise en œuvre opérationnelle des dispositions du présent article. Ces travaux donnent lieu à un avenant technique à la convention d’assurance chômage établie en application du présent protocole d’accord, au plus tard le 31 mars 2025.

Les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics de procéder, le cas échéant, aux modifications législatives et réglementaires nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’avenant technique.

En tout état de cause, la mise en place de ces ajustements ne peut avoir pour effet de remettre en cause la neutralité financière du dispositif.


CHAPITRE IV - Dispositions spécifiques

Article 10 - Dispositions relatives au régime spécifique des intermittents du spectacle

Les organisations signataires du présent protocole d’accord prennent acte de l’avis du comité d’expertise sur les règles spécifiques applicables en matière d'indemnisation des artistes et des techniciens intermittents du spectacle : dans son avis rendu public le 8 novembre 2023, le comité précise que l’accord sectoriel du 27 octobre 2023 relatif aux annexes VIII et X au règlement d’assurance chômage ne permet pas d’atteindre l’objectif de diminution de 15% du ratio dépenses/recettes fixé par le document de cadrage interprofessionnel du 28 septembre 2023.

En vertu des dispositions de l’article L5424-22 du code du travail, les organisations signataires du présent protocole d’accord conviennent du maintien des règles actuelles.

Article 11 - Règles spécifiques applicables au territoire de Mayotte

Afin de préserver l’équilibre existant, les parties signataires décident de proroger la règlementation spécifique actuellement applicable à Mayotte.

Un bilan de la mise en œuvre de la réglementation spécifique applicable à Mayotte sera établi au plus tard au 31 décembre 2025 dans le cadre d’un groupe politique paritaire sur l’assurance chômage, afin d’évaluer l’opportunité de faire évoluer cette règlementation.

Article 12 - Indemnisation des travailleurs frontaliers

Les dispositions du règlement CE n° 883/2004 prévoient les modalités de coordination des régimes de sécurité sociale et d’assurance chômage entre pays de l’UE, de l’EEE, et avec la Suisse, dans le but de favoriser la mobilité des travailleurs en Europe et la sécurisation de leurs parcours professionnels.

Néanmoins, un déséquilibre toujours croissant est constaté entre les prestations versées par le régime français au titre de périodes de travail effectuées dans ces pays frontaliers, et les montants remboursés par plusieurs de ces pays à l’assurance chômage française.

De plus, ce dispositif a des effets contreproductifs en matière d’attractivité pour certains territoires français frontaliers de pays, comme la Suisse, dont le niveau de vie est très supérieur à celui constaté en France.

Le projet de révision de cette réglementation présentée par la Commission européenne en décembre 2016, qui prévoyait notamment une réforme des règles d’indemnisation et de compensation entre Etats pour les prestations d’assurance chômage versées aux travailleurs transfrontaliers selon un principe simple (l’Etat membre qui a perçu les cotisations doit verser les allocations d’assurance chômage), n’a pu aboutir à ce jour.

Face au manque à gagner pour le régime français d’assurance chômage (le montant total du différentiel dépenses / recettes lié à l’indemnisation des travailleurs transfrontaliers était de 803 millions d’euros en 2023) et aux dysfonctionnements induits par ces règles pour le marché du travail dans certaines régions, les organisations signataires appellent formellement les pouvoirs publics à entreprendre toutes les actions nécessaires pour qu’une révision des dispositions du règlement CE n°883/2004 et des accords bilatéraux existants intervienne le plus rapidement possible.

Dans l’attente de cette révision, les organisations signataires du présent protocole d’accord conviennent des dispositions suivantes :

12.1 - Application aux salaires perçus à l’étranger d’un coefficient tenant compte des différences de salaires moyens entre l’Etat d’emploi et la France, Etat de résidence

Un coefficient à proportion du niveau de salaire moyen de l'Etat d'emploi, relativement au niveau de salaire moyen en France, est appliqué aux salaires perçus à l’étranger pris en compte dans la période de référence servant au calcul de l’allocation pour l’ensemble des bénéficiaires du régime d’assurance chômage.

Ce coefficient est calculé sur la base des niveaux de salaires moyens par pays constatés et publiés par l’OCDE, auquel est appliqué un coefficient correcteur de 1,1, afin de limiter les variations trop fortes du niveau de l’allocation par rapport à ce que le bénéficiaire aurait perçu sans l’application de cette mesure.

En tout état de cause, l’application de ces coefficients ne peut conduire au versement d’une allocation inférieure à l’allocation minimale, selon les modalités de calcul en vigueur à la date de signature du présent protocole d’accord.

Ce coefficient est réévalué annuellement en fonction des données statistiques disponibles.

12.2 - Accompagnement et suivi des demandeurs d’emploi frontaliers ayant exercé leur dernier emploi dans un pays limitrophe

Dans une logique de dynamisation des parcours de retour à l’emploi durable des demandeurs d’emploi frontaliers, les organisations de salariés et d’employeurs signataires du présent protocole d’accord demandent :

d’une part, pour les seuls travailleurs frontaliers, une révision réglementaire de l’offre raisonnable d’emploi pour spécifiquement tenir compte du niveau de rémunération pratiqué en France pour le type de poste recherché ;

d’autre part, la mise en place par l’opérateur France Travail d’un plan d’action devant notamment se traduire par :

un temps de diagnostic personnalisé, permettant pour chaque demandeur d’emploi frontalier une actualisation de son projet personnalisé d’accès à l’emploi ou de son contrat d’engagement (à compter du 1er janvier 2025), tenant compte de la révision de l’offre raisonnable d’emploi frontalier ;

la définition et la mise en œuvre d’un accompagnement ou d’un suivi personnalisé et éventuellement renforcé, en fonction de leurs besoins propres ;

la mise en place des moyens adéquats permettant un repérage plus efficace des reprises d’emploi non déclarées, notamment dans un Etat limitrophe.


Le contrôle de la recherche d’emploi des transfrontaliers s’inscrit dans le cadre doctrinal fixé par le conseil d’administration de France Travail, qui précise notamment que ce contrôle est, pour l’ensemble des demandeurs d’emploi, nécessairement différencié de leur accompagnement et suivi, et est en conséquence opéré par des équipes dédiées à cette mission. Il est organisé dans le cadre d'orientations nationales, votées en conseil d’administration, respectant une part minimale de contrôles aléatoires et des ciblages, déterminés nationalement, éventuellement adaptés régionalement.

Article 13 - Règles spécifiques relatives aux contrats d’emploi pénitentiaires

L’article L. 5424-30 du code du travail, introduit par l’ordonnance n°2022-1336 du 19 octobre 2022 relative aux droits sociaux des personnes détenues, ouvre le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi aux détenus, à leur sortie de détention, au titre de l’activité exercée sous contrat de travail d’emploi pénitentiaire durant leur détention.

L’article L. 324-12 du nouveau code pénitentiaire renvoie à la négociation des Partenaires sociaux le soin de définir les mesures d’application.

Les ex-détenus pourront être indemnisés au titre de l’ARE, dans les conditions fixées par le règlement d’assurance chômage, sous réserve de certains aménagements tenant compte des particularités du contrat d’emploi pénitentiaire qui ne constitue pas un contrat de travail, s’agissant notamment du point de départ de l’indemnisation et de l’appréciation de la condition de chômage involontaire. 


CHAPITRE V - Financement de Pôle emploi, mise en place et pilotage de France Travail

La mise en place de France Travail prévoit de confier à Pôle emploi, futur opérateur France Travail, de nouvelles missions : accompagnement renforcé des allocataires du RSA, coordination du futur « Réseau pour l’emploi », mise en place de systèmes d’information interconnectés, etc.

Pour atteindre l’objectif du plein emploi et faire face à l’ensemble des enjeux en termes d’accompagnement des demandeurs d’emploi, de formation en lien avec les besoins en compétences des branches, des territoires, et des entreprises, de services répondant aux difficultés de recrutement des entreprises et notamment des TPE PME, les questions du financement du futur opérateur et de la gouvernance du futur Réseau pour l’emploi sont stratégiques.

S’agissant du financement de Pôle emploi, futur opérateur France Travail, les signataires du présent protocole d’accord considèrent qu’il est indispensable de mettre en place une programmation budgétaire pluriannuelle partagée, basée sur une allocation de ressources claire, répondant à des besoins et missions précisément identifiés, et tenant compte des gains de productivité potentiels. Dans ces conditions, les organisations signataires estiment que le taux de la contribution prélevée sur les recettes de l’Unédic, fixé aujourd’hui à 11%, correspond à date, et sur la base des données à disposition des acteurs sociaux, aux besoins identifiés pour l’atteinte des objectifs poursuivis dans le cadre de la mise en place de France Travail.

S’agissant de la gouvernance du Réseau pour l’emploi, les signataires du présent protocole d’accord insistent sur la nécessité d’assurer aux organisations de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel un nombre de voix représentant, au total, au moins la moitié des voix délibératives au sein du Comité national pour l’emploi, ainsi qu’au sein des comités régionaux. En effet, les organisations de salariés et d’employeurs sont les mieux à même de connaître le fonctionnement du marché du travail, les besoins des entreprises et les problématiques rencontrées par les actifs. Cela est d’autant plus légitime que l’Unédic, dont ils sont gestionnaires, contribue aujourd’hui au budget du principal opérateur du service public de l’emploi, Pôle emploi, futur France Travail, à hauteur de quatre cinquièmes de son budget courant.


CHAPITRE VI - Financement et pilotage de France Compétences

Les partenaires sociaux sont opposés à ce que l’UNEDIC participe, d’une manière ou d’une autre, à l’équilibre budgétaire de France compétences.

Les partenaires sociaux se félicitent du développement de l’apprentissage, sur lequel repose l’essentiel de la hausse du budget annuel de France compétences. Outre les efforts réalisés dans le cadre de la révision des niveaux de prise en charge conduite en 2023, ils rappellent que plusieurs mesures de financement de l’alternance ont été proposées à l’article 17 de l’Accord cadre national interprofessionnel du 14 octobre 2021. Ces mesures, bien que non reprises à ce jour, sont de nature à favoriser la soutenabilité financière du système et à impacter positivement l’équilibre budgétaire de France compétences.

Dans un souci de partage des responsabilités, les partenaires sociaux appellent donc l’Etat à ne pas prélever les ressources de l’UNEDIC au profit de France compétences et à mobiliser d’autres leviers.

Article 14 - Durée, conditions d’application et entrée en vigueur du protocole d’accord

En vertu de l’article L5422-20 du code du travail, le présent protocole d’accord, donnant lieu à l’élaboration de la convention relative à l’indemnisation du chômage et ses textes annexés, est conclu pour une durée de 48 mois à compter de son entrée en vigueur : à l’issue de cette durée, ou en cas de modification ou suppression de l’article L 5422-20, il cessera de plein de droit de produire ses effets.

A l’exception de l’article 9 dont les modalités de mise en œuvre seront précisées par avenant à la convention d’assurance chômage au plus tard le 31 mars 2025, et des dispositions de l’article 5, le présent protocole d’accord s’applique aux salariés involontairement privés d’emploi dont la date de fin de contrat intervient à compter du 1er janvier 2025. Pour les salariés compris dans une procédure de licenciement, les dispositions du présent protocole d’accord s’appliquent uniquement à ceux visés par une procédure de licenciement dont la date d’engagement intervient à compter du 1er janvier 2025.

Toutefois, pour les mesures ayant un impact opérationnel conséquent, la convention relative à l’indemnisation du chômage pourra adapter cette date sur la base d’études d’impact, sans toutefois prévoir une date d’application ultérieure au 1er juillet 2025.

Les dispositions en vigueur au 31 décembre 2024, ainsi que les textes d’application, non affectés par les dispositions du présent protocole d’accord, régissant le régime d’assurance chômage, demeurent applicables.