Avenant du 14 novembre 2024 au protocole d'accord du 10 novembre 2023
Préambule
Les organisations de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel signataires du présent avenant tiennent tout d’abord à réaffirmer leur attachement à l’assurance chômage en tant que régime paritaire d’assurance sociale, obligatoire et contributif.
A cet égard, elles entendent prendre leur entière responsabilité pour permettre un fonctionnement juste et efficace du régime d’assurance chômage, dans une logique de sécurisation et d’incitation à la reprise d’emploi durable.
Les organisations de salariés et d’employeurs ont pris acte du courrier transmis le 9 octobre 2024 par la Ministre du travail et de l’emploi à l’ensemble des acteurs sociaux les invitant à reprendre les discussions sur l’emploi des séniors et l’assurance chômage, et « à proposer des mesures permettant de générer annuellement 400M€ d’économies supplémentaires. »
Les recettes de l’Assurance chômage continueraient de croître à horizon 2027, tout en étant fortement diminuées par les moindres compensations d’exonérations décidées par l’État.
Conformément aux engagements formulés dans le protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage, les organisations de salariés et d’employeurs ont engagé une négociation en vue de compléter ce protocole d’accord, tout en poursuivant les objectifs fixés dans ce dernier :
ajuster certaines règles d’indemnisation pour mieux tenir compte de situations spécifiques sur le marché du travail,
simplifier et améliorer la lisibilité de la réglementation d’assurance chômage dans une logique d’équité,
améliorer la compétitivité des entreprises au profit de l’emploi durable.
A cet effet, les organisations signataires conviennent des dispositions suivantes, modifiant le protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage :
Article 1 - Modification de l’article 3 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’ajustement des règles spécifiques d’indemnisation pour améliorer le taux d’emploi des séniors
Le contenu de l’article 3 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 est remplacé par les dispositions suivantes :
Dans l’objectif d’améliorer le taux d’emploi des séniors, les parties signataires conviennent d’adapter la règlementation pour tenir compte de l’allongement des carrières et sécuriser la reprise d’emploi durable pour les demandeurs d’emploi séniors. Les dispositions du présent article supposent la mise en place effective de la loi n°2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 qui a porté l’âge légal de départ en retraite à 64 ans.
Article 3.1. Décaler les bornes d’âge pour l’entrée dans la filière spécifique d’indemnisation
Aujourd’hui, les allocataires âgés de 53 ans ou plus à leur fin de contrat bénéficient d’une période de recherche de l’affiliation de 36 mois pour les salariés âgés de 53 ans et plus à la date de fin de contrat de travail contre 24 mois pour le droit commun, et de durées d’indemnisation plus longues : depuis le 1er février 2023, 22,5 mois pour les 53-54 ans, 27 mois pour les 55 ans et plus contre 18 mois pour les allocataires de moins de 53 ans.
Les organisations signataires conviennent de faire évoluer les bornes d’âge pour l’entrée dans la filière d’indemnisation (âges à partir desquels la durée maximum de droit est allongée) comme suit :
30 mois, durée initiale avant l’application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit 22,5 mois d’indemnisation maximum (30 mois pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte) pour les allocataires âgés de 55 et 56 ans à la date de fin du contrat de travail ;
36 mois, durée initiale avant l’application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit 27 mois d’indemnisation maximum (36 mois pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte) pour les allocataires âgés de 57 ans et plus à la date de fin du contrat de travail ;
les demandeurs d’emploi âgés de 55 ans et plus à la date de fin de contrat de travail bénéficient d’une période de recherche de l’affiliation de 36 mois.
Article 3.2. Décaler l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein
La règlementation d’assurance chômage actuelle prévoit un mécanisme de maintien des droits, sous certaines conditions, à compter de l’âge légal de la retraite et jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein.
Ainsi, en cohérence avec l’évolution progressive de l’âge légal de départ à la retraite jusqu’à 64 ans en 2030, il est procédé au décalage progressif jusqu’à 64 ans de l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible jusqu’à obtention des conditions de liquidation de la retraite à taux plein.
Article 3.3. Allonger la durée d’indemnisation en cas de formation pour l’ensemble des demandeurs d’emploi de 55 ans et plus, dans la limite de 137 jours
Les règles actuellement en vigueur prévoient pour les demandeurs d’emploi de 53 et 54 ans une durée d’indemnisation plus longue – jusqu’à 182 jours avant application du coefficient de 0.75 appliqué à la durée d’indemnisation, soit jusqu’à 137 jours supplémentaires selon les conditions actuelles (182 jours pour les allocataires résidant en outre-mer, hors Mayotte, le coefficient lié à la contracyclicité n’y étant pas appliqué) – en cas de formation validée par France Travail (anciennement Pôle emploi) ou financée par le CPF.
Afin de créer les conditions optimales d’une reprise d’emploi durable pour les demandeurs d’emploi séniors et de faciliter leur accès à la formation, ce dispositif est appliqué dans les même conditions pour l’ensemble des demandeurs d’emploi âgés de 55 ans et plus à la date de fin de leur contrat de travail qui suivent une formation en cours d’indemnisation ayant donné lieu à une indemnisation en ARE ou AREF.
Article 2 - Modification de l'article 9.4 du protocole d'accord du 10 novembre 2023 concernant l'ajustement du dispositif de Bonus-malus
Le contenu de l’article 8 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 concernant la suppression de la contribution exceptionnelle temporaire mise en place par le protocole d’accord du 28 mars 2017 est remplacé par les dispositions suivantes :
En son article 2.2, le protocole d’accord du 28 mars 2017 prévoyait la mise en place d’une contribution exceptionnelle de 0,05% « pour une durée maximale de 36 mois ».
Conformément aux dispositions du protocole d’accord du 28 mars 2017, et de la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage, cette contribution exceptionnelle temporaire est donc supprimée à compter du 1er mai 2025.
Article 3 - Modification de l’article 9.4 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 concernant l’ajustement du dispositif de Bonus-Malus
Le contenu de l’article 9.4 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 concernant les modalités d’application de l’ajustement du dispositif de Bonus-Malus est remplacé par les dispositions suivantes :
Considérant la nécessité de disposer d’une analyse d’impacts financiers et opérationnels précise de l’ensemble de ces évolutions, les organisations signataire conviennent de mettre en place un groupe de travail afin de définir les modalités de mise en œuvre opérationnelle des dispositions du présent article. Ces travaux donnent lieu à un avenant technique à la convention d’assurance chômage établie en application du présent protocole d’accord, au plus tard le 31 mars 2025.
Les organisations signataires demandent aux pouvoirs publics de procéder, le cas échéant, aux modifications législatives et réglementaires nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’avenant technique.
En tout état de cause, la mise en place de ces ajustements ne peut avoir pour effet de remettre en cause la neutralité financière du dispositif.
Article 4 - Modification de l’article 12 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’indemnisation des travailleurs frontaliers
Le contenu de l’article 12 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage concernant l’indemnisation des travailleurs frontaliers est remplacé par les dispositions suivantes :
Les dispositions du règlement CE n° 883/2004 prévoient les modalités de coordination des régimes de sécurité sociale et d’assurance chômage entre pays de l’UE, de l’EEE, et avec la Suisse, dans le but de favoriser la mobilité des travailleurs en Europe et la sécurisation de leurs parcours professionnels.
Néanmoins, un déséquilibre toujours croissant est constaté entre les prestations versées par le régime français au titre de périodes de travail effectuées dans ces pays frontaliers, et les montants remboursés par plusieurs de ces pays à l’assurance chômage française.
De plus, ce dispositif a des effets contreproductifs en matière d’attractivité pour certains territoires français frontaliers de pays, comme la Suisse, dont le niveau de vie est très supérieur à celui constaté en France.
Le projet de révision de cette réglementation présentée par la Commission européenne en décembre 2016, qui prévoyait notamment une réforme des règles d’indemnisation et de compensation entre Etats pour les prestations d’assurance chômage versées aux travailleurs transfrontaliers selon un principe simple (l’Etat membre qui a perçu les cotisations doit verser les allocations d’assurance chômage), n’a pu aboutir à ce jour.
Face au manque à gagner pour le régime français d’assurance chômage (le montant total du différentiel dépenses / recettes lié à l’indemnisation des travailleurs transfrontaliers était de 803 millions d’euros en 2023) et aux dysfonctionnements induits par ces règles pour le marché du travail dans certaines régions, les organisations signataires appellent formellement les pouvoirs publics à entreprendre toutes les actions nécessaires pour qu’une révision des dispositions du règlement CE n°883/2004 et des accords bilatéraux existants intervienne le plus rapidement possible.
Dans l’attente de cette révision, les organisations signataires du présent protocole d’accord conviennent des dispositions suivantes :
Article 12.1. Application aux salaires perçus à l’étranger d’un coefficient tenant compte des différences de salaires moyens entre l’Etat d’emploi et la France, Etat de résidence
Un coefficient à proportion du niveau de salaire moyen de l'Etat d'emploi, relativement au niveau de salaire moyen en France, est appliqué aux salaires perçus à l’étranger pris en compte dans la période de référence servant au calcul de l’allocation pour l’ensemble des bénéficiaires du régime d’assurance chômage.
Ce coefficient est calculé sur la base des niveaux de salaires moyens par pays constatés et publiés par l’OCDE, auquel est appliqué un coefficient correcteur de 1,1, afin de limiter les variations trop fortes du niveau de l’allocation par rapport à ce que le bénéficiaire aurait perçu sans l’application de cette mesure.
En tout état de cause, l’application de ces coefficients ne peut conduire au versement d’une allocation inférieure à l’allocation minimale, selon les modalités de calcul en vigueur à la date de signature du présent protocole d’accord.
Ce coefficient est réévalué annuellement en fonction des données statistiques disponibles.
Article 12.2. Accompagnement et suivi des demandeurs d’emploi frontaliers ayant exercé leur dernier emploi dans un pays limitrophe
Dans une logique de dynamisation des parcours de retour à l’emploi durable des demandeurs d’emploi frontaliers, les organisations de salariés et d’employeurs signataires du présent protocole d’accord demandent :
d’une part, pour les seuls travailleurs frontaliers, une révision réglementaire de l’offre raisonnable d’emploi pour spécifiquement tenir compte du niveau de rémunération pratiqué en France pour le type de poste recherché ;
d’autre part, la mise en place par l’opérateur France Travail d’un plan d’action devant notamment se traduire par :
un temps de diagnostic personnalisé, permettant pour chaque demandeur d’emploi frontalier une actualisation de son projet personnalisé d’accès à l’emploi ou de son contrat d’engagement (à compter du 1er janvier 2025), tenant compte de la révision de l’offre raisonnable d’emploi frontalier ;
la définition et la mise en œuvre d’un accompagnement ou d’un suivi personnalisé et éventuellement renforcé, en fonction de leurs besoins propres ;
la mise en place des moyens adéquats permettant un repérage plus efficace des reprises d’emploi non déclarées, notamment dans un Etat limitrophe.
Le contrôle de la recherche d’emploi des transfrontaliers s’inscrit dans le cadre doctrinal fixé par le conseil d’administration de France Travail, qui précise notamment que ce contrôle est, pour l’ensemble des demandeurs d’emploi, nécessairement différencié de leur accompagnement et suivi, et est en conséquence opéré par des équipes dédiées à cette mission. Il est organisé dans le cadre d'orientations nationales, votées en conseil d’administration, respectant une part minimale de contrôles aléatoires et des ciblages, déterminés nationalement, éventuellement adaptés régionalement.
Article 5 - Modification de l’article 14 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à sa durée, ses conditions d’application et son entrée en vigueur
Le contenu de l’article 14 du protocole d’accord du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage portant sur sa durée, ses conditions d’application et son entrée en vigueur est remplacé par les dispositions suivantes :
En vertu de l’article L5422-20 du code du travail, le présent protocole d’accord, donnant lieu à l’élaboration de la convention relative à l’indemnisation du chômage et ses textes annexés, est conclu pour une durée de 48 mois à compter de son entrée en vigueur : à l’issue de cette durée, ou en cas de modification ou suppression de l’article L 5422-20, il cessera de plein de droit de produire ses effets.
A l’exception de l’article 9 dont les modalités de mise en œuvre seront précisées par avenant à la convention d’assurance chômage au plus tard le 31 mars 2025, et des dispositions de l’article 5, le présent protocole d’accord s’applique aux salariés involontairement privés d’emploi dont la date de fin de contrat intervient à compter du 1er janvier 2025. Pour les salariés compris dans une procédure de licenciement, les dispositions du présent protocole d’accord s’appliquent uniquement à ceux visés par une procédure de licenciement dont la date d’engagement intervient à compter du 1er janvier 2025.
Toutefois, pour les mesures ayant un impact opérationnel conséquent, la convention relative à l’indemnisation du chômage pourra adapter cette date sur la base d’études d’impact, sans toutefois prévoir une date d’application ultérieure au 1er juillet 2025.
Les dispositions en vigueur au 31 décembre 2024, ainsi que les textes d’application, non affectés par les dispositions du présent protocole d’accord régissant le régime d’assurance chômage, demeurent applicables.
Dans une logique de transparence et de bonne lisibilité des textes régissant l’assurance chômage, sont annexés à cet avenant :
un tableau récapitulant l’estimation des impacts financiers actualisés des mesures prévues par le protocole d’accord du 10 novembre 2023 modifié par le présent avenant ;
une version consolidé e du protocole d’accord du 10 novembre 2023.
Fait à Paris, le 14 novembre 2024
Signataires
- Pour le MEDEF,
M. Hubert MONGON - Pour la CPME,
M. François ASSELIN - Pour l’U2P,
M. Christophe SANS - Pour la CFDT,
M. Olivier GUIVARCH - Pour la CFTC,
M. Frédéric BELOUZE - Pour la CGT-FO,
M. Michel BEAUGAS